12 juillet 2015

L’après-guerre



A la Libération, les affaires reprirent mais dans un climat différent. Les commerçants indépendants eurent à faire face à la concurrence des supermarchés.  Papi avait de surcroit ouvert un restaurant place Franklin à Mulhouse. Il était actionnaire majoritaire de « L’Alsace », ce qui lui valut des inimitiés et des jalousies.
                                Autour d’une table familiale vers les années 1970 : Auguste et Liliane en tête de table, sans doute pour un anniversaire de Grand’Papi.
Grand Mamie eut pratiquement toute la charge des commerces de boucherie-charcuterie faisant l’admiration de beaucoup de Mulhousiens. Auguste la secondait  mais l’époque du commerce alimentaire avait « du plomb dans l’aile ». Progressivement, il fallut se rendre à l’évidence et se séparer des différents magasins. Puis le Franklin fut vendu et enfin les parts sociales de « L’Alsace » furent achetées par le Crédit Mutuel.
Dans les années cinquante Grand Papi fut victime d’un sérieux accident de la route. Il fut hospitalisé et bien soigné à la clinique de St Damien à Mulhouse. Des liens d’amitié se tissèrent entre les religieuses, Grand Papi et Grand Mamie qui apportait quotidiennement à son époux hospitalisé des repas qu’elle confectionnait elle-même. Pendant une bonne décennie, tous les 1er mai, Papi et Mamie offraient à chaque soeur un bouquet de muguets. A Noël et Pâques les mêmes recevaient des chocolats. La clinique St Damien comptait bien une quarantaine de soeurs infirmières ou soignantes à l’époqiue
La générosité du couple ne s’arrêta pas là. Papi et Mamie ont offert  aux orphelins de Mulhouse, des jouets, des friandises et des charcuteries à Noël et    Pâques.
 Plusieurs églises de Mulhouse et des environs ont bénéficié de la générosité du couple qui a aussi parrainé les cloches de l’Oelenberg ainsi qu’un vitrail de l’église St Etienne de Mulhouse.
Par ailleurs lorsque les Banatais , population de l’Est de l’Europe, arrivèrent en Alsace, un peu comme les migrants d’aujourd’hui, Papi et Mamie ont accueilli deux  familles avec enfants qu’ils hébergèrent. Tous étaient logés et nourris. Même attitude quelques années plus tard  lorsqu’il s’est agi d’accueillir des populations venues d’Afrique. Certains de ces migrants s’en souviennent encore aujourd’hui.
Grand Papi mourut le 3 décembre 1981, à 74 ans. Il y avait foule à son enterrement : des corps constitués, mais aussi beaucoup d’anonymes qui se souvenaient de sa générosité, du temps de sa richesse et de sa splendeur.



Grand Mamie continua d’habiter pendant plusieurs années encore dans l’immeuble  familial de la rue de la Sinne. Puis l’immeuble fut vendu, comme fut vendu l’hôtel restaurant Franklin sur la place du même nom à  Mulhouse. Les acquéreurs le transformèrent en supermarché.

L’époque était devenue très tumultueuse. Problèmes économiques et problèmes de santé eurent raison  du courage et de la réussite de notre couple pendant cinquante ans. C’est ainsi que progressivement le livre d’images fortes, altruistes, se referma sur l’évolution du temps et les difficultés de la vie.

Depuis elle vit dans un appartement du centre ville, toujours vaillante au point d’être indépendante. C’est elle qui cuisine ses repas au quotidien, qui joue au scrabble, à la belote et d’autres jeux. Elle lit énormément,  « L’Alsace » certes mais aussi beaucoup de livres, notamment d’histoire que lui apportent ses petits- enfants : neuf petits-enfants et vingt-deux arrière petits enfants.
A l’extérieur, beaucoup de Mulhousiens, souvent plus jeunes, la reconnaissent et elle est ravie de ces contacts.
Et puis, elle donne l’exemple d’une croyante fervente, déplorant la baisse de la fréquentation et des connaissances religieuses. Elle garde son courage et sa joie de vivre, toujours prête à les faire partager aux autres.